Culture générale ↑ Boileau après avoir traité dans cette satire Alexandre d’écervelè, d’enragé, de bandit, n’aurait pas dû, plus tard, chercher dans ce souverain un exemple à donner a Louis XIV comme il le fit dans son Art poétique : Nous nous intéresserons dans cet article à une œuvre de Boileau comparant les mérites respectifs des animaux et des êtres humains. » Boileau finit même par convertir la satire lucilienne en pur espace dévolu au droit de critiquer nommément les auteurs, de les exposer « à la risée de tout le monde [57] ». On voit que, par-delà les idées qui opposent les deux débatteurs, le combat verbal qui s’amorce se situe également entre l’humilité humaine incarnée par Boileau et l’orgueil humain incarné par la figure caricaturale du docteur. ». Boileau, poète du XVIIe siècle contemporain de Molière et La Fontaine, est principalement connu pour son art poétique définissant les règles de la poésie classique, œuvre où l’on trouve les célèbres vers : « Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement, Et les mots pour le dire arrivent aisément. Les textes sont disponibles sous licence Creative Commons Attribution-partage dans les mêmes conditions ; d’autres conditions peuvent s’appliquer. 23Pierre Bayle, dans son Dictionnaire historique et critique (1695-1697) [46], formule l’acte de décès d’une forme d’écriture ressentie comme insupportable, et bientôt honnie par les philosophes des Lumières. Ce roi des animaux, combien a-t-il de rois ? 31Tel est l’état d’esprit avec lequel Boileau écrit ses premières œuvres : pour arracher la vérité et faire tomber les masques, il provoque et défie des aînés qui règnent sur la vie littéraire – Chapelain, Desmarets, Cotin. Boileau se trouve néanmoins au cœur d’une longue querelle qui lui permet de définir une nouvelle attitude critique et d’initier les grands combats idéologiques du XVIIIe siècle. Dans la deuxième partie du XVIIème siècle, un grand nombre d’auteurs essaye de se démarquer auprès du grand public, en se penchant sur les critiques de la cour ou … Il est célèbre pour son parti pris dans la querelle des Modernes et des Anciens, et pour ses œuvres, comme les … On rampe dans la fange avec l’Abbé de Pure ? Paris, J. Ribou, 1669. Le texte s’achève sur une conclusion humoristique assénant un coup de grâce à l’orgueil humain. Dernière publication diffusée sur Cairn.info ou sur un portail partenaire. Il ne se comporte pas en chrétien charitable [31]. Il suscite la verve d’ennemis innombrables qui souvent usent du genre lucilien pour lui répliquer et le dénigrer. On retrouve ici encore l’idéal stoïcien ou chrétien de l’homme rationnel capable de dominer ses passions, idéal à la lumière duquel les vices de l’homme réel sautent aux yeux. 2 Une telle hypothèse d’un déplacement des limites de l’acceptabilité du discours pro-« janséniste » ; 3 Pour une analyse des équivoques de l’Epître XII, cf. Certains noms répétés, comme Pradon ou Cotin, deviennent par antonomase des synonymes de poète médiocre et prétentieux. 2) Il semble qu’il faille alors toujours recommencer : Métaphore filée de l’artisan, v. 171 -172 : « métier, ouvrage, polissez, repolissez » mise en valeur avec le Pour rendre sa parole plus efficace et plus décisive, il pratique la satire nominale : « J’appelle un chat un chat et Rolet un fripon [4]. Attaques et réponses se succèdent et constituent alors une nouvelle querelle littéraire. Ce mouvement se confond avec l’impétuosité satirique ; il dévoile hardiment la vérité que médiocres et flatteurs s’emploient à masquer. Une telle prise de position signait en fait l’arrêt de mort de ce genre littéraire. Vous avez été déconnecté car votre compte est utilisé à partir d'un autre appareil. Elle revêt une allure punitive. Dans un quatrième moment, Boileau fait à nouveau intervenir son docteur qui essaie tant bien que mal de sauver l’homme de la critique du poète en lui attribuant une nouvelle spécificité considérée comme supérieure : l’homme seul, comme le veut Aristote, est un être politique, capable de vivre dans des cités et d’obéir à des lois. L’émotion publique qu’il suscita fut à la hauteur de ses espérances. Lucilius, auteur de satires régulières, montra l’exemple [47]. Sans jamais prendre en considération le divertissement littéraire qu’elles peuvent causer et encore moins leurs prétentions à s’ériger en censure et en tribunal, Bayle s’attaque à la « démangeaison insurmontable de publier des Satires [48] ». La satire, de toute façon, comme Horace l’a énoncé, n’appartient pas à la poésie véritable, synonyme d’élévation et de transports [37] ! 2. Le satirique finit ainsi par jouir pleinement de la forme suprême de parrêsia en régime monarchique, celle de conseiller du Prince, qui dispose d’une certaine immunité dans l’exercice libre de la parole [72] : le vrai conseiller s’oppose en effet au flatteur qui transforme le maître en tyran ou bien se contente de le subir comme tyran. Ma plume pour rimer trouve l’Abbé de Pure. Bayle ne la considère pas comme une forme noble ou digne d’intérêt. Bruno Bonnefoy. Boileau ne réinvente pas la vieille satire lucilienne – moribonde – mais il s’inscrit dans une histoire de la critique comme dénonciation des illusions du monde et comme « constitution du sujet par lui-même ». De telles questions croisent celles du juste et de l’injuste, de la relation entre juridiction satirique et institution judiciaire. Il savait Le duc de Montausier, protecteur et ami de Chapelain, ne décolère pas contre le poète qu’il veut envoyer « aux galères [44] ». Lisez ce Archives du BAC Commentaire de texte et plus de 249 000 autres dissertation. Les Grecs appellent parrêsia cette liberté de dire-vrai, en dépit de la peur, voire de la mort, notamment en face du tyran. Dans son esprit, la satire fait du rire et de la dérision des instruments au service d’une peur censée travailler à l’harmonie sociale. Mais son œuvre permet aussi de poser des problèmes liés au rapport entre langage poétique et liberté de dire le vrai, au caractère de véridiction d’une parole libre. Vous n’êtes actuellement pas connecté(e) en institution. Comme le souligne son contradicteur indigné, la supériorité intellectuelle de l’homme sur les animaux en général semble être une évidence, et il est plus évident encore qu’il existe des animaux moins intelligents que l’homme (comme le ver ou la fourmi !). La parrêsia satirique, comme la parrêsia philosophique de Socrate et de Diogène, est « une pratique qui trouve dans la critique de l’illusion, du leurre, de la tromperie, de la flatterie, sa fonction de vérité [76] » ; elle est aussi affirmation d’un sujet libre et autonome, capable de détacher son jugement des formes traditionnelles de l’autorité. Continuellement métapoétique, la satire boilévienne ne cesse de représenter le mécanisme de sa propre genèse, de se décrire comme une profession de vérité, un processus de véridiction et finalement comme une source de la règle dans le domaine esthétique. Il faut paraître affranchi, tout en participant au rire et à la fête des sens. Le thème de la satire est l’orgueil humain, raillé à travers une comparaison malicieuse entre les qualités et défauts de l’homme et ceux de l’animal. Le but de la satire, écrit-il, « est de corriger en divertissant ». Boileau fait alors l’inventaire de ses vices pour prouver la supériorité de l’animal sur l’homme : l’homme est inconstant, soumis à ses passions, immoral et faussement savant. des "Oeuvres diverses" de 1674, avec les satires VII,VIII et IX. La Satire VIII est construire sous la forme d’un dialogue entre Boileau et un théologien. 4. Jamais on n’a converti un ennemi avec une satire ! 1La publication des Satires de Boileau en 1666 fit scandale. Plus largement, la « sottise » ici attribuée à l’être humain est à comprendre avant tout comme une infériorité morale, comme on le verra dans la suite de la satire. dans l'éd. ; Politique de confidentialité Il échoue à renouveler la figure du satirique, dont il précipite au contraire la chute, mais il s’impose comme législateur du Parnasse et fait émerger la figure du critique littéraire au sens moderne. Boileau est un auteur français né en 1636 et décédé en 1711. Satire V – À M. le marquis de Dangeau. Aperçu du corrigé : SATIRES de Boileau (résumé & analyse) Publié le : 18/11/2018-Format: Zoom. dans l'éd. (2) Bussi, dans son Histoire galante, raconte beaucoup de galanteries très-criminelles de dames mariées de la cour. Karl Kraus dans les années 1930, au moment de la montée du nazisme, expliquait que la satire n’a plus d’objet quand la réalité finit par dépasser en bêtise l’invention satirique [77]. LECTURE LINÉAIRE : ART POÉTIQUE (Anthologie, p. 150) INTRODUCTION a) Présentation du texte. Et d’attentat horrible on traita la Satire. Les vers qui suivent consistent à montrer, en poursuivant le dialogue, que dans toutes les caractéristiques qu’il partage avec l’animal, l’homme est inférieur à ce dernier, et que ce qui est spécifiquement humain est inutile ou nuisible. Boileau s’appuie sur les échecs de la médecine du XVIIe siècle (également tournée en ridicule par Molière dans plusieurs de ses pièces) pour discréditer la science : « … jamais chez eux [les animaux] un médecin, N’empoisonna les bois de son art assassin. 24Une fois publiées les sept satires du recueil de 1666, Boileau passa le restant de sa vie à se justifier et à se défendre contre ceux qu’il agresse [54]. ». Boileau contrevient aux recommandations des grands théoriciens du genre, lesquels reprennent à leur compte une règle d’or énoncée par Martial : « parcere personis, dicere de vitiis », « épargner les personnes et n’attaquer que les vices [5] ». Ce choix est à rapporter au contexte historique du XVIIe siècle : la cupidité est alors plutôt un vice bourgeois, tandis que l’ambition guerrière concerne en premier lieu l’aristocratie. Brossette note dans son commentaire au vers 125 de la satire IX: « Notre auteur possédait dans un grand degré de perfection le talent de contrefaire toutes sortes de gens. des "Oeuvres diverses" de 1674, avec les satires VII,VIII et IX. Nous nous intéresserons dans cet article à une œuvre de Boileau comparant les mérites respectifs des animaux et des êtres humains. Et de fait avant d’être adoubé par Louis XIV, qui le prend à son service, et par l’Académie, Boileau ne fonde ses jugements de valeur que sur l’immédiateté de son rire et sur la violence de son indignation : « Et je serai le seul qui ne pourrai rien dire ! Prob: En quoi ce texte est-il une parodie d’épopée ? L’homme de la nature est le chef et le roi : Bois, prés, champs, animaux, tout est pour son usage, Et lui seul a, dis-tu, la raison en partage. Attention, différent de la « paresse » de Saint Amant ! En dépit de ses protestations, Boileau utilise aussi la satire comme exutoire à des différends très personnels ou comme arme dans des luttes d’influence. Je n’ay nommé personne dans mes Vers, parce que mon dessein est de profiter et non pas de nuire. Ce texte est une satire extraite des Satires (1660-1695) de Boileau. Et de fait, il n’y a pas de grand rire satirique, sans une pensée et un rêve du sublime. 2Après 1666, toute satire classique en vers prendra Boileau pour référence ou pour cible. Dans le sillage de Montaigne et de Descartes forgeant les concepts nécessaires à une pensée du sujet sans Dieu, mais aussi de Théophile et de Corneille inventant la notion moderne d’auteur [73], Boileau illustre une forme de discours qui, à son niveau, réévalue les rapports de l’individu et du pouvoir. / Je rencontre à la fois Perrin et Pelletier, / Bonnecorse, Pradon, Colletet, Titreville [25]. Versailles sous le sceau de la satire – Boileau, Satire XI Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles – www.chateauversailles.fr Secteur éducatif - RP 834 - 78008 Versailles Cedex 01 30 83 78 ». Poète, traducteur, polémiste et théoricien de la littérature, il fut considéré en son temps et par la postérité comme le législateur ou le « Régent du Parnasse [1] » pour son « intransigeance passionnée [2] ». Cotin, à bout d’arguments, conclut l’un de ses pamphlets par ces paroles vengeresses : « Le destin de ces frenetiques / Que l’on appelle Satyriques, / C’est de mourir le cou cassé, / Et vivre le coude percé [45]. Boileau lui aussi prend son temps pour écrire son poème. Le texte que nous allons étudier est la Satire VIII de Nicolas Boileau, écrite comme tous ses textes poétiques en alexandrins à rimes plates (AABBCCDD…). Corriger le poème. 10Cette mise au point ne lui fut pas d’un grand secours. ». Autrement dit, la prétendue civilité de l’homme, loin d’être la preuve de sa supériorité, est plutôt la preuve de son infériorité morale : là où les animaux, du moins au sein de leur propre espèce, vivent dans le cadre d’une sorte de moralité naturelle, les hommes sont naturellement si immoraux qu’ils ont besoin des lois et de la police comme d’un rempart contre leurs pulsions agressives. 3 S’il ne sent point du Ciel l’influence secrète, 4 Si son astre en naissant ne l’a Boileau fait alors l’inventaire de ses vices pour prouver la supériorité de l’animal sur l’homme : l’homme est inconstant, soumis à ses passions, immoral et faussement savant. Le Major Spécial Écrits 2021 est en ligne ! Boileau – Le plus sot animal, à mon avis, c’est l’homme. Ses détracteurs ne manquèrent pas de rendre coup pour coup à ses attaques, alternant, comme dans un procès, le réquisitoire et le plaidoyer [9]. Le recueil de 1666 fait entendre en maints endroits, notamment dans la Satire VII, l’indignation que suscita cette exclusion. Les embarras de Paris Boileau. Autrement dit, non seulement l’homme est physiquement dominé par certains animaux, mais, défaut plus grave, il est intérieurement dominé par de nombreuses passions. La loy de la Satyre et la loy de la raison, c’est d’épargner le criminel et non pas le crime. Versailles sous le sceau de la satire – Boileau, Satire XI Etablissement public du château, du musée et du domaine national de Versailles – www.chateauversailles.fr Secteur éducatif - RP 834 - 78008 Versailles Cedex 01 30 83 78 00 – activites.educatives@chateauversailles.fr Versailles sous le sceau de la satire Boileau, Satire IX, extraits Nicolas Pradon, auteur de tragédies, est quant à lui la cible de nombreux assauts [16] ; il multiplie les libelles : Le Triomphe de Pradon [17] ; Nouvelles remarques sur tous les ouvrages du sieur D*** complétées par l’Épître à Alcandre [18] ; Le Satirique français expirant [19]. Le goût de la polémique littéraire, la réflexion du moraliste, le sens aigu du. Il importe donc à la puissance publique de réprimer « l’audace des Ecrivains satiriques », car ils sont animés par « l’esprit de médisance et de vengeance [52] ». Le surplomb du rire et de la juste colère finit par lui donner un ascendant, qui, à son tour, conforte la position surplombante du satirique. L’animal qui ouvre cette série de duels avec l’homme est la fourmi. [46] Tout conspire à la fois à troubler mon … Boileau, dans une prosopopée qui conclut la satire, suggère en effet que l’âne, témoin quotidien des vices humains, s’empresserait, s’il pouvait parler, de dénoncer la sottise des hommes : « Oh ! Sa réussite est immense : il travaille auprès du Prince ; il accroît le pouvoir de contrôle et de réformation par les mœurs ; il devient la conscience littéraire de son époque. You are currently viewing the French edition of our site. 1 Nicolas Boileau L’Art poétique (1674) Chant I 1 C’est en vain qu’au Parnasse un téméraire auteur 2 Pense de l’art des vers atteindre la hauteur. 1663 , 144 vers, « La vraie noblesse » Dans cette satire, Boileau se moque des nobles qui tirent vanité de leur seul nom, et rappelle qu'il leur appartient, par leurs actes et leur vertu, de mériter la gloire et l'honneur évoqués par celui-ci. Jean Chapelain était chargé de soumettre au roi une liste d’écrivains susceptibles de recevoir une gratification royale, mais il en excluait Nicolas Boileau et son frère Gilles. Analyse des textes « La cour du lion » de Jean de la Fontaine et « Les Satires » de Nicolas Boileau. La satire littéraire et la satire morale se posent en complément de l’institution judiciaire et en alternative séculière à la pastorale chrétienne [74].